jeudi 17 avril 2014

1 mois

Oui, on ne le dira jamais assez, le temps passe viiiiiite! bon, en même temps, je sens bien que ça fait un certain nombre de nuits que je dors pas vraiment... et j'ai quand même l'impression de profiter à fond de mon petit bonhomme, haut comme trois pommes, qui change à vue d'oeil. Petite séance photo dans le bain tout à l'heure...







Et puis sinon bin, demain soir, Mathieu est enfin en vacances, et il a très très légèrement hâte... il en peut plus!! moi je suis bien contente qu'on soit tous les 4 pendant 3 semaines, et ça va faire du bien aussi d'avoir des "bras relais" autour de nous... on met le cap sur Nimes pour quelques jours chez Domen et Sylvie, puis on met les voiles sur Feugarolles (vers Agen) pour voir Seb et Rachel, on redescend sur Nimes en passant une nuit à Toulouse chez Arthur et Rosanne, puis Nimes chez François et Anne pendant 8-10 jours (ouf! faut quand même qu'on se repose aussi!!), puis on remonte sur Gre mais en passant 2-3 jours à Mantel (Ardèche) chez des copains qui retapent un truc gigantesque composé de plusieurs maisons. Bref, ça va bouger quoi! j'espère que Manoé sera pas trop brassé par tous ces va et viens, mais y'aura toujours le sein de maman pas loin pour le rassurer! Tout ça pour dire qu'il n'y aura peut être pas trop de news dans les semaines à venir... BISOUS!!

mardi 15 avril 2014

Life

Bon, fut le dire, depuis dimanche, les nuits sont assez mortelles, et les journées aussi... Manoé est passé en mode "Glue night and day" c'est un peu dur! il a besoin d'être beaucoup au sein, pour manger mais aussi pour se rassurer, et il ne dort plus beaucoup tout seul. Du coup la nuit, on est collé, autant dire que je dors pas hyper bien quoi!! en plus ça fait 2 jours que Mathieu a des migraines, donc je me retrouve un peu toute seule à gérer la bête... bon, cette nuit je devrais avoir un torse supplémentaire sur lequel poser Manoé pour qu'il dorme, ça va faire un peu du bien, ne serait-ce qu'une heure ou deux.
Sinon il change à vue d'oeil, il est beau comme un coeur, il ouvre de grands yeux étonnés sur le monde qui l'entoure. Visite du 1er mois cette aprèm: 4kg100 et 50.5cm... pas de doute, il tète, mais c'est efficace!! bref, un petit bonhomme en pleine forme. Bon, comme pour Nolan, on doit faire une écho cardiaque vu qu'il devient bleu quand il s’énerve, mais je suis pas franchement inquiète!!
Nolan va bien, il est à fond. Ce matin, je lui explique le programme des vacances (qui débutent vendredi soir, yehaaaaaaaa), il je lui dis "c'est trop cool hein?" et il me répond "non, c'est pas trop cool, c'est DE-MENT"!! bref, il me fait rêver...











dimanche 13 avril 2014

Nol et Mano

 


Nolan est vraiment un chouette grand frère. Il lit des histoires à Manoé, lui donne son doudou et lui prête ses jeux, propose de le bercer quand j'en ai marre, il essaye de lui redonner son pouce quand il se réveille, il ne râle pas quand son frère le réveille à 7h du mat'... il aime par dessus tout le prendre sur lui, lui faire des câlins, lui raconter des trucs à l'oreille, et c'est vrai que Manoé à l'air de bien apprécier ça aussi.

Et j'ai ressorti des photos de Nolan au même âge... bin c'est assez bluffant la ressemblance (jme disais bien aussi que cette tête me disait quelque chose)!! heureusement que les cheveux changent de couleur!





vendredi 11 avril 2014

Le Combat



J’avance à l’ombre des pins. Le bruit de mes pas est étouffé par l’épaisse couche d’aiguilles recouvrant le sol. L’odeur de la résine emplis l’air sec de cette radieuse journée. En passant à côté d’un arbre, je pose ma main sur l’écorce rugueuse du tronc. En fermant les yeux je me concentre et tente de percevoir la vie qui bat sous l’écorce. Le flux lent mais immuable de la résine, les ondes propagées par l’énergie du soleil le long des feuilles. Sa réaction avec la chlorophylle, si importante pour ma propre survie : l’absorption du dioxyde de carbone et le rejet de dioxygène. Je suis mentalement le processus de séparation des atomes qui permet à l’arbre d’utiliser le carbone pour croitre, lentement, mais  sans arrêt.
Ma méditation, ma communion avec l’arbre est stoppée net. Une vibration, un flux dans l’air me fait frissonner. Je rouvre les yeux et cherche à appréhender l’évènement, d’abord avec mes yeux et mes oreilles. Des animaux fuient. Tous dans la même direction. Ils ont peur. Je ressens le dégagement de pensées, de phéromones qu’ils déploient pour alerter tous leurs congénères. Leur terreur est telle qu’ils n’essayent même pas d’altérer leur trajectoire en s’approchant de moi, qui suis pourtant pour eux un prédateur redoutable. Je me protège derrière le tronc, pour éviter d’être bousculé. Le flux vital de l’arbre semble réagir à l’agitation qui règne.
Progressivement, les bruits s’estompent. Il ne reste plus que moi dans la zone. Le danger se rapproche, je le perçois moi aussi désormais. Une odeur nauséabonde, accompagnée d’une vibration maléfique, puissante, s’approche. Il vient pour moi. Je me détache de l’arbre, et empoigne la poignée de mon épée lourde qui dépasse de mon épaule gauche et la détache de son fourreau. En avançant vers la Source de Terreur, je laisse la pointe tracer un sillon sur mes pas. Je me souviens alors de ce que m’a appris mon maître. Alors je me concentre. Non pas sur les énergies qui permettent de manipuler les éléments qui m’entourent. Mais sur l’infiniment petit. Sur ce qui compose les éléments eux-même. Sur ce qui compose l’énergie elle-même. Un adversaire de cette trempe nécessite de telles extrémités. D’ailleurs, les êtres des ténèbres sont imbattables sans utiliser ce niveau de magie.
Il me regarde approcher. Ses griffes, longues comme mes avant-bras, sont plantées dans la terre meuble de la clairière. Il reste immobile. Son corps long et puissant frémit d’excitation. Sa tête de taureau me domine de deux bons mètres, ses pates avant, musculeuses, sont aussi épaisses que mon tronc, celles de l’arrière train au moins deux fois plus. Une tête de taureau et un corps de lion. Sa peau semble constituée de fumée grise, de poussières et d’ombres, sans cesse en mouvement, donnant une impression de flou assez terrifiante. Ses yeux rouges vifs, eux aussi parsemés d’ombres flottantes, me fixent avec avidité. Il veut mon âme. Sa nourriture préférée.
Mon cœur bats dans ma poitrine à un rythme effréné. Le son des battements résonne dans mes oreilles. Même mes longues années d’expériences et de vie de mage combattant  ne me permettent pas de calmer mon angoisse face à une telle créature. Je me mets en garde, et me prépare à manipuler les atomes de l’air ambiant pour créer une friction. Si j’arrive à charger suffisamment l’air en électricité, je peux créer un arc électrique suffisamment puissant pour déséquilibrer sa carapace de fumée et d’ombre, et attaquer avec mon épée La Source, son cœur, la sphère de vie qui le maintien dans ce monde.
Il a anticipé mon attaque ! Un frisson d’infinie terreur s’empare de mon esprit, alors que son rugissement s’élève, à peine mon mouvement entamé. Je sais que j’ai perdu, je sais que je suis mort. Son hurlement continue de résonner à mes oreilles quand l’obscurité m’engloutis, l’engourdissement m’enlève toute possibilité de lutte. Je vais mourir là, transpercé par les griffes du Béhémoth.
J’ouvre les yeux. L’obscurité est infinie. Je suis toujours engourdi. Je ne me rappelle pas ce qui m’a amené là. J’entends une voix lointaine. Est-ce celle des créatures de l’au-delà ? Soudain, elle devient claire, déchire l’obscurité elle-même et provoque un électrochoc terrifiant, angoissant, qui me fais reprendre instantanément tous mes esprits, ainsi qu’arriver une vague d’intense regret, comme si je pouvais sur un simple souhait retourner dans le monde dans lequel j’étais juste avant.
-« Putain Mathieu sérieux t’entends pas Nolan qui hurle depuis tout à l’heure ? J’en ai marre moi de me lever tout le temps, déjà que je suis crevée d’allaiter Manoé toutes les deux heures tu pourrais faire un effort ! »
-« Ok t’énerve pas, j’y vais… »
Hmmm… Dure réalité que la vie de parent.
Le point positif, c’est que j’ai encore toute mon intégrité physique et que quand même, je suis toujours vivant.
Et puis en fait, elle est vraiment bien la réalité ! J’ai pas une super épée qui déchire ni des pouvoirs exceptionnels, certes, mais je ne changerais ma vie pour rien au monde, ni pour un rêve.


jeudi 10 avril 2014

Hair cut

Hier, j'ai coupé les cheveux des garçons! j'ai aussi tondu Manoé mais comme c'est moche, j'attends que ça repousse pour vous montrer des photos...




mercredi 9 avril 2014

C'est jamais facile de trouver un bon titre

Bon, les nuits sot toujours assez terribles, surtout que Nolan réclame aussi un câlin régulièrement vers 3-4h du mat'!! bon, on accumule la fatigue, mais c'est bientôt les vacances pour les lumalila alors ça va le faire d'ici là...
A la maison, ça tousse, ça a la morve au nez (non, pas le petit dernier, ouf!), mais les journées sont belles et presque toutes très ensoleillées, ce qui nous permet de balader tous les jours, faire du vélo, téter dehors, hurler dans le cosy, pleurer parce qu'on veut pas garder son manteau, faire des bosses, du toboggan, rider sur les trottoirs!
Demain je descend à la ville voir mes copines au boulot, youhouuuu, j'ai hate de les voir!

Le Mano, pendant LA minute où il observe ce qui l'entoure dans son hamac (avant de se mettre à hurler, jusqu'à devenir tout bleu comme Nolan au même âge, avec trémolos ultra culpabilisants dans la voix et tout et tout...)




Nolan qui boit son thé au p'tit dèj


Ma boule blondinette qui sort du bain!


lundi 7 avril 2014

Accoucher à domicile, version PapaPoule...



Je ne me rappelle  plus vraiment comment le sujet est venu sur le tapis. Je me rappelle juste que j’ai dû répondre un truc du genre : « -Non mais ça va pas la tête ? Tu veux mourir avec le bébé ou quoi ? ». Peut-être pas aussi violemment. Mais quand même, c’est un peu l’effet que ça m’a fait. Au début. Et puis j’ai ouvert mes oreilles. J’ai discuté avec des mamans que je croise régulièrement. Puis avec Gisèle, Cécile et Marie.
Peu à peu mes appréhensions se sont estompées. Puis ont disparu. Penser à cette future arrivée du bébé m’a aussi fait repenser à ce que j’avais vécu pour Nolan. Un moment merveilleux, mais entaché de petites phrases, de petits moments qui, s’ils n’avaient pas eu lieu, ne m’auraient pas manqué. De la mainmise médicale, et du quasi non choix que nous pouvions opérer pour cet accouchement, ou de ces petites inattentions qui font que de futurs parents super confiants, nous sommes passés à de nouveaux parents complètement perdus car dépossédés de nos capacités, et de notre confiance, mise à mal par une personne en particulier dont la bienveillance, la considération portée au couple serait  comment dire ? …à travailler, avant d’officier auprès de tous jeunes parents. Par exemple quand on nous a dit : (à l’entrée de la salle d’op’ quand ils ont pensé faire une césarienne) « Ah non hein le papa il reste dehors », (ou, plus tard à la maternité)« Ah mais ma petite dame, vous savez que si vous ne choisissez pas un contraceptif très vite, Monsieur va devoir aller voir ailleurs si vous ne voulez pas retomber enceinte ! » ou encore « Ah ben c’est sûr que si vous lui caressez la tête en l’allaitant vous allez l’endormir et c’est évident qu’il ne prendra pas de poids. Vous voulez sortir ou pas ? ». Entre autres.
Je m’en suis peut-être fait toute une histoire, mais étant professionnellement engagé dans des réseaux d’accompagnement, de soutien à la parentalité, et militant pour que tous les parents aient droit à une reconnaissance de leur place et de leurs compétences, ces moments ont eu un écho particulier. Heureusement une fois sortis de la maternité, ces choses sont vite retournées au second plan. Mais pas oubliées. Bref, des petites choses qui, je le savais, n’arriveraient pas à la maison. Mais j’étais encore loin d’imaginer à quel point ce serait différent. Pas mieux. Parce que l’arrivée de Nolan fût elle aussi un moment magique, intense, que je n’oublierai jamais.

Pour cette deuxième grossesse, nous avons abordé les choses différemment. Dans la préparation, tout d’abord, puisque beaucoup plus que pour le Nolan, nous avons été préparés à ce qu’il se passe PENDANT l’accouchement. Chose qui avait été abordé pendant l’haptonomie lors de la première grossesse, mais pas de manière aussi précise. Ces séances, qui par ailleurs m’ont également permis de me rassurer sur mes propres capacités à accompagner Lucie pendant l’accouchement, m’ont tout d’abord permis de comprendre que lors d’une grossesse normale, sans complication ni pathologie particulière, la future maman est complètement capable de savoir ce qu’il se passe, et qu’il suffit de l’écouter pour savoir que tout va bien. Et pas seulement l’échographe. Pour moi, la grossesse a ceci de particulièrement frustrant que je ne peux pas ressentir ni interpréter ce qui se passe dans le corps de Lucie.
Un gémissement : ma réaction (inquiet): « -Ça va ? » Réponse « -mais oui, c’est juste une contraction, calme toi. »
Un gémissement + une grimace : ma réaction (en pensée : ça va c’est surement une contraction, mais quand même inquiet). Lucie : « - La vache, celle-là, elle était costaud ! » (un peu plus inquiet là.)
Un gémissement, mais un autre jour : (Vachement moins inquiet, les gémissements, ça va, c’est normal c’est les contractions, du coup, comme il n’y a pas de grimace, je laisse passer.) Lucie : «  - Tu t’en fous que j’ai mal ? Tu pourrais pas me proposer, je sais pas moi, un massage ou quoi ? ».
En vrai, j’exagère. Mais pas tant. Tout cela pour dire que décrypter sans ressentir est quasi impossible. Mais la préparation aide à comprendre tout ça, et à l’accepter, comme étant de fait quelque chose qui arrive et qui fondamentalement ne permet pas qu’on le vive sur le même pied d’égalité.  
Elles m’ont permis d’appréhender et de comprendre le passage du bébé de dedans à dehors, et presque même de le ressentir. Elles m’ont permis de comprendre que je pouvais avoir confiance en Lucie. Que quoi qu’il arrive, elle en est capable. Elle est capable d’accompagner ce bébé jusqu’à sa sortie. Et c’est ce qu’elle a fait, en ce 17 Mars 2014.
La journée a commencé comme quelques autres. C’est-à-dire pour moi au moment où les gémissements (avec grimaces) m’ont sorti du sommeil. On s’est regardés, on s’est câlinés, on a discuté, puis on a appelé Cécile car les gémissements + grimaces (systématiques) ont été de plus en plus fréquentes. J’ai réveillé ma mère, en lui disant qu’on allait bientôt descendre. Puis je suis allé prévenir les voisins, en leur proposant de monter prendre le petit déjeuner avec ma mère et Nolan. Et j’ai commencé à descendre les affaires. Lucie avait tout préparé, même une liste de ce qui n’était pas dans les sacs. Pas trop dur pour moi malgré la brume qui a commencé à envahir mon esprit, qui se fixe sur  les heures à venir. Aider Lucie. Ne pas trop réfléchir. La rassurer. On a le sac. On a l’oxygène. Les numéros sont enregistrés dans mon téléphone. Nolan est avec sa grand-mère. L’oxygène est bien là ? Oui c’est bon. Ah, le ballon, on en aura peut-être besoin. « -Ça va Lucie ?
- Les contractions s’espacent…
- On va aller marcher, on savait que ça pouvait arriver, le fait de descendre, de changer d’endroit. »
Alors on va marcher, on continue de discuter, puis on retourne à l’intérieur, car Lucie n’arrive plus à faire 5 mètres sans qu’il y ait une contraction. Et elle est fatiguée.
Je rapproche les alèses, prépare les serviettes, approche une bassine, met l’oxygène et la boite préparée par Cécile et Gisèle bien en vue. Lucie commence à s’endormir. Je passe le temps en jouant sur ma tablette. Je commence à me dire qu’il va falloir que j’aille au boulot, finalement.
PLOP. Je l’ai entendu et presque senti en même temps qu’elle. La poche des eaux est rompue. Cette fois c’est bel et bien parti, alors je rappelle Cécile, tout en me disant que peut-être elles arriveront avec Marie un peu tard pour aider. Et alors ? C’est pas grave, je serai là. Toujours dans cette brume de pensées et cet état un peu second j’essaye de répondre aux attentes de Lucie. Sauf qu’elles sont de moins en moins formulées clairement. Je sens bien que ça lui ferait du bien d’être massée, ou au moins placée dans d’autres positions, mais je ne suis pas assez à l’aise et Lucie refuse que je la touche. Alors je la laisse me broyer les doigts pendant les contractions, et je lui parle, essaye de savoir ce qu’elle ressent, dans les moments où elle arrive à me répondre. Elle est de plus en plus « à l’ouest ». Cécile et Marie arrivent et prennent les choses en main. C’est bien. Je me rends compte que j’étais inquiet même si j’assumais totalement d’être seul avec Lucie. Lucie accepte le contact et les massages de Marie et Cécile et cela semble bien la soulager. C’est parfait, comme ça je reste près d’elle, de son regard, je continue de lui donner la main. Elle est épuisée, alors je l’encourage.
Le bébé a un peu de mal à passer le col, alors Cécile nous prévient qu’on va peut-être devoir descendre à la maternité. Elle me demande de préparer les affaires au cas où.
Une enclume se pose au fond de mon bide. Des nausées et un peu de bile l’accompagnent.
Je monte à la maison chercher le Cosy, quelques affaires pour Lucie, les clés de la voiture et prévenir ma mère, Nolan et les voisins. J’essaye de ne pas laisser paraitre ni mon inquiétude, ni ma déception. Ne serait-ce que pour Nolan.
Je redescends, Cécile décide de donner un petit coup de main au bébé pour passer le col pendant que je me mets en face de Lucie, à genoux, ses bras autour de mon cou. Elle hurle. Mes tympans sifflent. Elle hurle plus fort. Je vois la tête et je le lui dis. Je l’encourage encore. J’ai de la bile au fond de la gorge. Mais je tiens. Je reste en face d’elle. La tête sort puis le reste du corps, j’ai les muscles tellement contractés que lorsqu’il atterrit là, entre nous deux, j’ai l’impression de l’avoir expulsé en même temps que Lucie. Mais sans la douleur, et je le sais. Alors je lui dis toute l’admiration que j’ai pour elle. C’est une guerrière, pour supporter ça, l’assumer, jusqu’au bout.
Manoé nous a montré le bout de son nez. Lucie tremble mais semble se remettre rapidement, elle s’allonge, Manoé près d’elle, pendant que je monte annoncer la nouvelle à Nolan, sa grand-mère et les voisins. Puis les moments s’enchainent : La délivrance, puis le cordon que je coupe, puis la première tétée. Le temps se distend, semble inégal en ce jour particulier, parfois rapide, parfois lent, comme ce premier peau à peau, en attendant que Lucie se douche avec Cécile et Marie.
On remonte à la maison. On est chez nous, dans une impression de continuité bien agréable. On retrouve notre quotidien, qu’on redécouvre à quatre, avec l’aide de ma mère.

Dans les jours qui suivent je suis dans un état d’euphorie hyperactive postpartum qui fait que je n’arrête pas de m’occuper, en bricolant, nettoyant, cuisinant, jouant avec Nolan. Cet état durera presque une semaine.

De cette expérience, j’ai retenu que nous sommes capables d’accueillir un enfant naturellement, et de le faire bien, sans soutien médical obligatoire. Que je peux faire confiance à Lucie pour écouter, comprendre et maitriser son corps, sans qu’on lui dise comment « mieux » faire. Qu’être accompagné pour faire naître un enfant à domicile ce n’est pas prendre des risques inconsidérés, mais bien avoir le choix de vivre ce moment dans des conditions que l’on ne peut obtenir que dans son petit nid douillet. Que même s’il faut partir pour la maternité, l’important est d’avoir été considérés comme capables.

Merci Cécile, Marie et Gisèle, de nous avoir permis de faire ce choix.

dimanche 6 avril 2014

Life

Les jours passent, et cela fait bientôt 3 semaines que Manoé est entré dans nos vies. Les journées sont belles et paisibles, les nuits très très hachées et un peu moins réjouissantes... pourtant il dort, mais il a besoin de téter souvent (j'ai fait le compte, il fait 3 nuits pourries où il tète toutes les 2h voir toutes les heures en fin de nuit, et puis suivent 2 nuits où il ne s'éveille que toutes les 3-4h... là on se réveille requinqué avec Mathieu comme si on avait fait une cure de sommeil!!). Il passe de plus en plus de temps à observer ce qui l'entoure de ses grands yeux bleus, on commence à pouvoir le poser dans son pouf même réveillé (mais pas trop longtemps quand même, faut pas déconner...), il dort comme un loir à plat ventre et depuis 2 jours, il est fan de son pouce... comme un petit air de famille avec son grand frère! Nolan est d'ailleurs très fier que son frère suce son pouce comme lui.
Nolan est d'humeur assez rebelle et nous fait bien tourner en bourrique pour l'habiller, le laver, le changer, lui faire faire la sieste qu'il fait péter une fois sur deux, sortir faire du vélo avec les chaussures de Noa et pas celles de Jules, ne jamais rentrer du terrain de jeux, ne manger que des pâtes, du kiri, des poires et des yaourts au chocolat... mais il passe aussi de très bons moments à câliner son frère, lui expliquer ce qui se passe et le rassurer, lui montrer ses jeux et les lui prêter, nous faire rire et nous faire des blagues, faire des puzzles pendant des heures (va falloir renouveler le stock, ça devient beaucoup trop facile les 16 pièces!!), relire encore et encore les mêmes livres (en ce moment Popi à la neige et Trotro et le dentifrice ont trop la cote!)...
Hier on est allé à Décath dépenser les sous de notre cagnotte...on a commandé des barres de toit et un attelage sur internet, et à décath on a acheté un super porte vélo à fixer sur une boule d'attelage. On a aussi acheté un matelas gonflable et des sièges de camping parce que les nôtres ont vécu trop de soirées au coin du feu et qu'on en a marre de se casser le dos comme des roots... on vieillit, ha, haaa!!
Aller, avant de vous régaler des dernières photos, j'en profite pour remercier tous ceux qui ont eu le courage de lire mon texte sur l'accouchement à domicile... les commentaires nous ont beaucoup touché, et on est vraiment heureux de pouvoir partager ça avec vous, alors tant mieux si ça vous a plu aussi!! merci les amis...

Ma langouste et ma crevette qui se font un câlin au réveil! crevette qui ne prend pas le même chemin que son grand frère qui prenait péniblement 200g par mois, Manoé le téteur fou a pris 400g en 8 jours!! il a des petites plis aux poignets, sur les cuisses, un double menton, et des mégas joues à bisous!!




Pas facile encore d'arriver à prendre Manoé réveillé en photo!



Le MatGeek, espèce en voie d'apparition (le genre papa poule, cuisinier, bricoleur, compagnon amoureux, qui fait les courses et le ménage, un peu bordélique quand même et ronchon quand il a faim, et qui ne laisse passer aucune occasion d'allumer sa tablette, de zieuter son smartphone, de jouer à la playstation...)

Puzzle man
 Le 2ème suceur de pouce!


jeudi 3 avril 2014

Accoucher à domicile



Revivre une grossesse pour accoucher, j’en avais envie depuis plusieurs mois. Me retrouver enceinte à nouveau, m’arrondir, sentir le bébé bouger en moi, grandir, prendre sa place dans notre famille, et surtout, accoucher de ce bébé. Etonnant n’est-ce pas ? A l’hôpital, j’ai pourtant bien accouché par voie basse pour Nolan, mais ce moment a laissé beaucoup de traces, et pas qu’agréables. J’avais envie, besoin, de vivre mon accouchement pleinement, intensément, à mon rythme. Avant même d’être enceinte d’un deuxième bébé, je savais tout ça et je voulais tenter l’expérience de l’accouchement à domicile. Au début, Mathieu était totalement contre cette idée, pensant comme beaucoup que je mettrais ma vie en danger, ainsi que celle du bébé… mais au fil de nos discussions, il a accepté de rencontrer les sages-femmes et d’envisager cette idée.

La 1ère écho sous le bras, nous avons donc rencontré Gisèle, qui accouche à domicile depuis 10 ans et qui a vu naitre plus de 700 bouts de choux. Dans une ambiance très zen, nous passons 1h30 à discuter de la naissance de Nolan, de ce qu’elle nous a fait vivre, ce qu’elle a eu de magique et de moins drôle, et du coup ce qui nous amène à l’envie d’accoucher chez nous. Elle nous écoute, enchantée par le chemin que l’on fait tous les 2 pour vivre cette 2ème naissance différemment. Elle répond à toutes nos questions, nos inquiétudes avec beaucoup de bienveillance. Nous ressortons de ce 1 er rendez-vous rassurés et tous les 2 partants pour cette aventure. Le mois suivant, nous faisons la connaissance de Cécile et Marie, les 2 autres sages-femmes. Le jour J, ce sera soit Cécile, soit Gisèle, mais il y aura aussi forcément Marie sur la fin, pour seconder sa collègue si besoin. Là encore c’est une belle rencontre, qui nous amène à reparler de l’accouchement de Nolan et de ce qui nous amène à l’envie d’accoucher à domicile.

Ensuite, tous les mois je vois Cécile et Gisèle, qui s’assurent l’une et l’autre que tout va bien, que les échographies sont normales, que le bébé a bien la tête en bas, que je me sens bien… Nous avons aussi 3 cours sur le déroulement de l’accouchement à domicile, durant lesquels on évoque l’accouchement physiologique, ses étapes, le fonctionnement du corps de la femme à ce moment là, le chemin du bébé et sa position dans le bassin, les indices auxquels se réfèrent les sages-femmes pour s’assurer que le bébé va bien ou au contraire ce qui les alerte et peut amener à un transfert à l’hôpital, ce qui se passe en cas de transfert… on y parle aussi de nos angoisses, de nos envies (accoucher dans l’eau, conserver son placenta, on a appris plein de trucs insoupçonnés !!), on partage nos expériences avec les autres couples. Elles nous exposent sans prendre parti les dépistages et les traitements (toxoplasmose, streptocoque B), nous laissant décider par nous-mêmes grâce à des documents et des articles qu’elles nous transmettent. Comme c’est bon de ne pas se sentir infantilisé mais capable de prendre nos décisions nous même une fois que l’on a été bien informé ! et de la même manière, le suivi de la grossesse est très simple, naturel, et très centré sur ce que la femme ressent. Un seul toucher vaginal au 7ème mois à ma demande, parce que j’avais besoin de savoir si le col avait bougé, mais sinon, elles posaient les mains sur mon ventre pour dire bonjour à Bean et faire connaissance pendant que l’on discutait. Là encore, je n’avais pas réalisé à quel point je me suis sentie dépossédée de mon propre corps pour Nolan. Pourtant non, on n’est pas obligé de mettre la main dans le vagin d’une femme enceinte pour savoir si sa grossesse se passe bien… en fait, il suffit juste de lui demander. J’ai donc passé ma grossesse à écouter mon corps, à me faire confiance sur ce que je pouvais ressentir, passant parfois par des moments de doutes et d’angoisses, mais sans que cela prenne toute la place.

Les semaines et les mois sont passés, et 5 semaines avant le terme, Cécile, Gisèle et Marie sont venues au Sappey faire une visite à domicile. On a appris ce jour là qu’on ne pourrait pas accoucher chez nous au 1er parce que l’escalier en colimaçon ne permet pas d’être évacuée par le SAMU dans de bonnes conditions. Petit coup dur, on ne s’attendait pas à ça avec Mathieu. Finalement, après discussion, apéro et tablette de chocolat, Lionel et Géraldine, nos voisins adorés, nous laisseront leur salon le jour de l’accouchement. On essaye de mettre au point les petits détails pour que l’échange d’appartements soit le moins contraignant possible pour eux ce jour-là…

Les jours passent et à la maison, tout est prêt : la liste de tout ce qu’il faudra descendre chez les voisins, le sac de Bean et mon sac en cas de transfert à l’hôpital, la bouteille d’oxygène, la bâche de protection pour les matelas et le canap’ (bin oui, on voudrait quand même pas saloper le canapé des voisins !) les alèses, les compresses, les ciseaux pour couper le cordon, les serviettes pour essuyer le bébé, les culottes filet trop sexy, les serviettes hygiéniques XXL, la bouillotte, les fruits secs, les CD… bref, tout ce qui rendra ce moment unique, magique, chaleureux, réconfortant, rassurant.

Dimanche 16 Mars, Sylvie vient d’arriver pour passer 15 jours avec nous. Ce soir-là, elle parle à mon ventre et explique à Bean que maintenant, il peut sortir. D’ailleurs, elle lui a amené une histoire, que Mathieu lui lit : c’est un bébé qui est trop bien dans le ventre de sa mère, et quoi que puisse lui proposer sa mère, ses frères et sœurs ou grands-parents pour lui donner envie de naitre, il refuse de sortir, jusqu’au moment où le papa rentre du travail et fait un bisou à chaque membre de la famille, bisou que le bébé ne peut pas recevoir, ce qui le frustre suffisamment pour qu’il ait envie de sortir du ventre pour en avoir aussi.

Vers 3h du matin, j’allume mon portable pour voir l’heure puisque les contractions m’ont réveillées. Douloureuses mais seulement toutes les 10 minutes, elles me maintiennent éveillée. Je me lève, l’appartement est calme, silencieux, tout le monde dort. La pleine lune illumine le salon, je contemple les étoiles, la forêt. Je suis calme, je n’ai pas envie que ça s’arrête, je veux mettre au monde ce bébé. J’ai l’impression de l’attendre depuis trop longtemps, j’ai besoin de le sentir non plus en moi mais en dehors, dans mes bras, mes mains, mon cou. Je lui parle, je l’encourage, je le rassure, lui dit que je suis prête. Vers 6h, je réveille Mathieu avec mes gémissements. On commence à y croire à cet accouchement ! on se parle, on se câline, on ne veut pas laisser filer ce moment. A 7h, les contractions s’intensifient, toutes les 2 minutes, parfois moins. On appelle les voisins, puis Cécile. On convient avec elle de se rappeler quand on sera installé dans le salon de Lionel et Géraldine. L’heure qui suit est assez fun : Mathieu fait des aller-retour pour descendre tout ce qu’il nous faut, Lionel lance un feu dans la cheminée, prépare le cartable d’Axel et jette 3 affaires de ski dans un sac, Géraldine monte avec Axel et Tom pour le petit dèj, Nolan est heureux de voir son copain de si bon matin, Sylvie prépare la table et veille sur son petit-fils, et moi je contemple tout ce petit monde entre deux contractions ! Une fois en bas, les contractions s’espacent. On a changé d’endroit, nos repères ne sont plus les mêmes, on sait que ça peut freiner le travail. Du coup, on sort marcher un peu dans la rue, espérant ne pas croiser de monde. Au 2ème aller-retour au fond de la rue, je m’enfile une grosse tranche de brioche. Au 3ème, je ne peux plus marcher pendant les contractions. On rentre à la maison, je me change et m’habille confortablement. Je suis crevée, j’ai très envie de dormir ! je m’allonge un peu, envoie Mathieu chercher sa tablette pour le sentir occupé plutôt que l’œil rivé sur sa montre pour calculer le temps entre deux contractions. Intense fatigue. Je commence à m’endormir, pour me réveiller en sursaut, réalisant que si je m’endors, c’est parce que ça doit bien faire 10 minutes que j’ai pas eu de contraction. Frustration, déception, colère. Non, ça ne peut pas s’arrêter maintenant ! Il est 9h30. De dépit, je passe la main sous mon ventre et je le secoue un peu, comme pour lui dire « aller, au boulot ! », et là, tel un ressort de canapé qui lâche, un bouchon de champagne qui saute, un ballon plein d’eau qui se perce, je perds les eaux. Ce bruit, même Mathieu l’a entendu, c’était dingue. Je me retrouve trempée jusqu’au milieu du dos, semant du liquide partout que Mathieu essaye tant bien que mal de contenir sur les alèses. Je me retrouve à gérer plein d’émotions en même temps : la joie que l’accouchement soit bien pour aujourd’hui, mais aussi l’angoisse de ne pas y arriver car la douleur devient changeante et très intense. Mathieu rappelle Cécile, qui passe prendre Marie sur le chemin, et nous prévient qu’elles seront là d’ici 1h. Les contractions s’enchainent, je ne sais plus comment me mettre, j’agrippe Mathieu comme un noyé s’accroche à un tronc d’arbre, je suis emportée par la douleur, je perds la notion du temps. Je vomis la brioche. Mon corps produit un effort intense, je le laisse gérer et me contente de le suivre comme je peux, subissant les assauts de mon utérus. L’arrivée de Cécile et Marie me réconforte. Leur présence me fait du bien, je me sens en sécurité, et surtout, à peine sont-elles là qu’elles me prennent littéralement en main. Cécile m’encourage à accompagner les contractions avec des sons graves, Marie me masse le bas du dos et les fesses, ce qui me fait un bien fou. Mathieu est là, tel un rocher dans la tempête, sa main toujours près de la mienne, me couvant d’un regard respectueux et fier, tellement fier de ce que je suis capable d’endurer pour mettre au monde notre bébé. Les contractions me donnent envie de pousser, alors que je ne sens pas le bébé engagé dans le petit bassin. Cécile me fait changer de position pour l’aider à descendre, puis m’ausculte parce qu’elle trouve étonnant qu’il ne soit pas déjà là. Il reste un bon centimètre de col, mais Bean plonge tête baissée vers la sortie. Son cœur commence à peiner à reprendre son rythme, même entre les contractions. Cécile nous prévient que si dans 15 minutes il n’est pas né, on descend à la maternité. Mathieu se charge de réunir toutes les affaires, va chercher le cosy et les clés de la voiture, prévient Sylvie, Géraldine et Lionel qu’on va surement devoir descendre au CHU. Moi, je vis ça un peu à côté, je reste dans mes sensations, concentrée, et je m’accroche à ce que me dit Cécile pour aider le col à se dilater et surtout, aider Bean à s’oxygéner, me focaliser sur lui, l’aider dans sa descente. Je suis allongée sur le côté, ivre de fatigue, mais je m’accroche à l’idée qu’il sera bientôt là. Mathieu revient auprès de moi, et Cécile décide de faire passer le dernier centimètre de col derrière la tête de Bean. A la 2ème tentative, sa tête passe définitivement le col. A la demande de Cécile je me redresse à genoux, m’accroche au cou de Mathieu, à genoux lui aussi face à moi. S’il n’avait pas été là, à quoi aurais-je bien pu me retenir ? une fois redressée, je sens le bébé entre mes jambes, il est là, il arrive. Là, la douleur est vraiment terrible. Heureusement que l’expulsion est un réflexe physiologique, parce que j’avais envie de tout sauf de le laisser sortir par là tellement ça faisait mal. En parallèle, je réalise que je mets au monde mon bébé, que cette fois c’est sûr, d’ici quelques minutes, il sera né. Je hurle de douleur, perçant les tympans de Mathieu au passage, mais en l’espace de quelques terribles secondes, je sens que la tête est sortie. Ensuite, c’est comme une anguille expulsée par la contraction suivante. Cécile accompagne sa sortie, mais il vient naturellement se poser entre Mathieu et moi. A ce moment-là, un rayon de soleil inonde le salon et se pose sur le bébé. Je suis un peu hébétée, encore groggy par la douleur, mais soulagée qu’elle ait pris fin. Je contemple étonnée cette petite chose poisseuse qui gémit doucement entre nous. Mathieu dit « Un p’tit gars, bin ça alors ! ». En effet, c’est un garçon. C’est Manoé.

Je m’allonge comme je peux contre Manoé, dont le cordon est très court, mais comme le placenta sort déjà, on est rapidement plus à notre aise tous les deux. Mathieu est monté rassurer tout le monde, et annoncer à Nolan qu’il avait un petit frère ! Tout le monde est heureux ! Il revient vers moi, sur un nuage, et contemple sa merveille en me félicitant pour mon courage de guerrière… je suis tellement contente de l’avoir fait, d’avoir vécu ce moment intensément, de l’avoir partagé avec Mathieu, d’avoir mis au monde notre petit sappeyard. Cécile et Marie sont installées à table, remplissant les papiers pour la déclaration de naissance, nous laissant tout à notre joie et portant un regard attendrit sur notre trio. Sans hésiter, Manoé se met à téter avec ardeur. Nolan et Sylvie descendent admirer la petite merveille, née à peine ½ heure plus tôt. Puis Géraldine, émue et heureuse de nous voir à 4. Elle sortira ensuite de quoi manger pour Cécile et Marie, leur fera un petit café, les régalera de biscuits… je les regarde de mon petit coin de paradis sous le soleil, le cœur plein d’affection, trop heureuse de pouvoir vivre ça. Mon corps tout entier est secoué de tremblements, je le sens qui évacue la tension qu’il a subi pendant presque 3h. J’ai chaud, puis froid, puis chaud… et je contemple Manoé qui tète tout contre moi, je me perds dans les yeux bleus de Mathieu, je m’imprègne de ce moment unique, entier, plein de vie.

Cécile et Marie se rapprochent. Mathieu coupe le cordon, puis on installe Manoé dans un petit hamac en tissu pour le peser : 3kg330 mon petit gaillard. Ensuite, on lui nettoie les fesses puisqu’il a fait caca, on lui met une couche, puis on l’installe en peau à peau contre son papa pendant que je vais prendre une douche. J’avais oublié cette sensation du ventre qui pèse, qui donne l’impression de tout tirer vers le bas, y compris mes poumons ! Une fois lavée, nous remontons chez nous, où l’on retrouve Nolan et Tom, Sylvie et Géraldine, heureux de nous accueillir. Quel plaisir de se retrouver dans son lit, sa petite grenouille nue sur le ventre, sous d’épaisses couvertures. Nolan passera l’après midi à faire des aller-retour entre son frère et moi, et puis ses jeux, son vélo, son papa, sa grand-mère. Sylvie ne s’arrête plus de sourire et déjà, elle me dorlotte. Je mange une poire juteuse et sucrée, c’est un délice.

Avant de repartir, Cécile et Marie remontent nous voir pour nous dire au revoir. Elles nous remercient pour cette belle journée et cette naissance. Elles ont le don de rendre unique ce moment, c’est incroyable. Je ne réalise pas encore à quel point c’est précieux.

Dans les 15 jours qui suivent la naissance, elles viendront chacune deux fois, pour peser, mesurer et admirer Manoé, et discuter avec nous, parler de l’accouchement, de l’allaitement, de Nolan, répondre à nos questions et petites angoisses de jeunes parents. Elles nous auront aussi au bout du fil d’ailleurs… les accueillir à la maison est toujours un vrai plaisir, et leur dernière venue me rend un peu triste. Je réalise ce que l’on a vécu avec Cécile et Marie, cette naissance magique et heureuse, et c’est une page qui se tourne. Fin de la grossesse, de l’accouchement et de la naissance… bien sur, c’est aussi le début d’une nouvelle et belle aventure à 4 ! mais je garde au chaud dans mon cœur le souvenir de ces quelques heures partagées, pleines de vie, de joie et de douleur, d’attente et d’espoir, de magie et de simplicité. Des heures pleines d’humanité pour que notre petit Manoé arrive sur Terre dans la chaleur et la douceur, pour que sa naissance soit uniquement synonyme de bonheur.

Après la naissance de Nolan, j’ai mis plusieurs mois à ne plus me sentir vide. La place qu’il a laissée en moi à sa naissance a créé un grand gouffre, une absence, un « rien » désagréable. Mon corps était mou comme du chewing-gum, la peau de mon ventre flasque, mes muscles terriblement lent à répondre à mes envies de rebondir. Cette fois-ci, mes ressentis n’ont rien à voir. Je me sens vraiment bien dans mon corps, je fais attention à moi. Mathieu me trouve belle et je peux accepter ses marques d’affection avec plaisir et émotion. Bien sûr, cela tient au fait que je me suis mieux préparée au « post » accouchement, mais je suis convaincue que cela vient aussi de la manière dont j’ai pu vivre ma grossesse et la naissance de Manoé grâce à Cécile, Gisèle et Marie. En restant maitre de son corps et de ses sensations, en restant à son écoute, on ne peut que mieux vivre les moments difficiles. 

Accoucher à domicile, c’est la seule alternative à l’hôpital dont on dispose. La prise de risque est mesurée (des études très sérieuses le prouvent), et les sages-femmes qui s’engagent à nos côtés sont compétentes et se battent quotidiennement pour nous proposer en tant que couple un accompagnement bienveillant, soutenant, adapté à nos vies et à nos envies. Quand on se lance dans l’aventure de l’accouchement à domicile on ne le dit pas à n’importe qui, parce qu’il faut se justifier, convaincre, se sentir prêt à affronter les peurs très encrées des autres sans se laisser démonter. Quel dommage de ne pouvoir en parler plus librement comme d’un choix réfléchit, un choix de couple qui veut mettre au monde son bébé dans les meilleurs conditions possibles. Or ces conditions ne sont pas forcément assurées à l’hôpital, c’est une réalité. Les femmes devraient toutes pouvoir choisir, mais pour cela, il faut qu’elles soient informées, et ce de manière impartiale. C’est aussi pour ça que j’écris, pour que vous puissiez à votre tour en parler autour de vous, que les mentalités évoluent, qu’on parvienne à se détacher de la toute puissance médicale lorsque c’est possible, qu’on arrête de traiter les sages-femmes qui accouchent à domicile comme des sorcières qui font prendre des risques inconsidérés à la mère et à l’enfant. Parce que non, avec Mathieu, on n’est pas des extrémistes prêts à accoucher dans les bois par rejet de l’hôpital et de ce qu’il représente. On voulait juste pouvoir mettre au monde ce bébé. Et on l’a fait. Grâce à elles.

                                                             Avec Marie                                                                                   
         

                                                                    et Cécile